Cette journée là, tempête de ciel bleu et belle température estivale frisant les 25 degrès. J'avais même pu me mettre en chemise pour l'occasion.
Après avoir pêché le second pool d'une belle petite rivière du nord de la Norvège, en compagnie d'Eric et un pêcheur local sympa qui pêchait avec un speycast très coulé et 'élégant', vers les 11:00, je lui demandais si la pêche en sèche était productive sur cette rivière. Il me montra sa canne à une main appuyée au portique d'accrochage des poissons et déjà équipée d'un bomber, me répondit que oui et qu'il avait l'intention de s'y mettre, là.
Du coup, je repars vers le camping-car chercher ma canne à une main, une Albright de 9 pieds soie de 7. Alors que je la montais et choisissais quelques bombers, Eric arrive et me dit "Whouaa, le gars vient d'en faire un, au bomber, à son troisième lancer!". Stimulés par cette information, on s'équipe et je redescend sur le pool.
En effet, un poisson de 1.5 à 2 kg était pendu au portique du pool et notre homme était affairé à bombarder la queue du pool. Du coup je décide d'attaquer la partie qui me semblait la meilleure, une dizaine de mètres au dessus de lui, après lui avoir demandé l'autorisation, qu'il m'accorda avec un large sourire.
Au premier passage, dans la veine la plus près du bord, je vois un saumon monter violemment sur ma mouche après avoir fait demi-tour. Le soleil étant très haut dans le ciel on pouvait voir à une trentaine de centimètres sous l'eau, sans problème. Raté! le saumon avait du juste venir boxer cette mouche. Je relance pour une dérive identique et pareil. On aurait dit un 'replay' sur une séquence de film. Et ceci à trois reprises et toujours de manière aussi violente. Puis plus rien. Il faut dire que la troisième fois, j'ai quand même senti que l'hameçon avait du le piquer un peu.
Je décide donc de pêcher une veine un peu plus au large et au premier passage je pique un petit poisson de 1.5 kg que je remet à l'eau.
Quelques temps après, toujours à la même place, mais en pêchant encore plus avant, je pique un beau poisson de 3 ou 4 kg que j'avais vu monter sur je ne sais quoi mais qui a pris ma mouche sans aucune hésitation.
Je reviens pêcher la veine du bord et mon furieux prend cette fois-ci la mouche (toujours en descendant le courant) mais sans la rater. Il faisait 4 kilos et a été remis à l'eau lui aussi.
Eric qui avait pêché le pool près du parking revient et me dit avoir pris un saumon au bomber et fait monter quelques autres.
Vers 15:00 on retourne au camping-car pour casser une croute et on rencontre Jacques qui arrivait pour passer la soirée. Je lui dit qu'il arrive un peu tard et que le coup est terminé. C'est pas un problème, il restera pêcher avec nous jusque vers 18:00 car il a un rendez-vous à cette heure-ci.
A 16:00 on repart tous les trois sur le pool qui avait bien marché à midi. Mais le ciel c'est un peu chargé en nuages et le soleil n'est plus tout à fait au zénith. Je crains que ce soit trop tard pour faire monter des poissons sur un bomber. J'en profite donc pour expliquer à Jacques comment je pratique cette pêche. Malheureusement il n'a pas pris de canne à une main mais décide de tenter sa chance avec sa 15 pieds et un 'moustachu' que je lui ai donné. Cà marche, mais aucun poisson ne montera sur sa mouche.
Vers 16:30 je décide de descendre au premier pool à la mer, situé 200 mètres plus bas. Ce pool est bien reposé et quelques poissons fraichement montés de la mer se manifestent. La mer est haute et commence même à redescendre. Le meilleur moment donc, pour avoir une chance de prendre des poissons sur ce pool.
Toujours au bomber, je peigne méticuleusement la veine centrale de la partie basse du pool et un petit saumon vient, enfin, prendre mon bomber.
Je me pose quelques minutes sur un petit banc en bois afin d'observer la rivière. J'allais partir rejoindre Jacques quand, je ne sais pour quelle raison, je me dis qu'il serait peut-être intéressant de pêcher le 'V' que formaient les deux courants qui arrivaient dans le pool. en effet, deux bras de la rivière convergeaient en tête du pool.
Je place donc ma mouche dans cette partie plus calme. Le soleil me gène un peu mais je vois comme un gobage sur mon bomber, sans certitude. Je lève alors ma canne et un choc violent suivi du doux bruit du frein qui libère de la soie me fais réaliser que c'est bien un saumon qui a pris ma mouche. Après avoir pris une dizaine de mètres de soie, le poisson saute dans le bras de gauche et je peux constater alors que je tiens un très gros poisson. Du coup je me dis que je n'aurais pas du laisser ce noeud que j'avais essayé de défaire sans succès sur ma pointe de 30 centième.
Vu la configuration du pool, sans obstacle et pourvu d'une zone large et profonde en fin de courant, je pense pouvoir travailler ce poisson sans trop de problème. Mais j'envoie quand même une série de sifflets stridents en direction de l'amont, espérant que Jacques ou un autre pêcheur les entendent.
Le saumon se décide à descendre le courant. Je le suis, mais celui-ci ne s'arrête pas et part comme un fou dans la partie lisse, me prenant, du coup, près de 100 mètres de soie et backing. Je pompe méticuleusement, tout en ajustant le frein de mon moulinet Albrigth de façon a ramener le poisson près de moi, dans la 'fosse' qui est près du bord.
Arrive alors Jacques qui a entendu mes appels et c'est dit que je devais avoir besoin d'aide. Il est plus heureux que moi, connaissant mon infortune sur cette rivière. Le sort aurait-il été conjuré?
Je lui demande donc s'il se sentait capable de me saisir ce poisson par la queue si j'arrive à l'amener dans le petit bras au fond herbeux qui est un peu plus en dessous de nous. Il me dit vouloir essayer.
J'arrive à faire entrer le saumon dans ce petit bras sans courant et demande à Jacques de se positionner derrière le poisson afin de la saisir par la queue et de le pousser sur la berge.
Mais comme cela était prévisible, le saumon sentant l'herbe sous son ventre, décide de faire un dernier rush vers la rivière. Je le travaille à nouveau mais celui-ci est épuisé (comme moi) par 30 minutes de combat sans merci. Cette fois-ci Jacques a pu prendre la queue du saumon à deux mains et pousse le grand poisson au sec.
Quel beau saumon, une femelle tout frais montée de la mer. A la balance de la petite cabane du pool du parking, il affichera 11.560 kg. Il n'a pas été mesuré.
Cette année (ainsi qu'en 2006) les occasions de pêcher au bomber, sur les rivières que j'ai pratiquées, n'ont pas été nombreuses car la température de l'eau et de l'air n'ont jamais été très favorables. Mais lors de ces deux années j'ai quand même pu avoir la chance de pêcher deux jours avec des conditions idéales. En 2006 ce ne sont pas moins de 17 montées sur mon bomber et cinq saumons pris dont un de cinq kilos. Mais cette année restera ancrée dans ma mémoire à jamais.